Jean de Beins est un ingénieur géographe du début du XVIIe siècle ayant servi François de Bonne, Seigneur de Lesdiguières. Mais pourquoi s’intéresser ici à ce jeune ingénieur ? Pour ses cartes du Dauphiné !
On sait à quel point les cartes ont de tout temps été précieuses pour connaitre le territoire, voyager, commercer, surveiller, conquérir… Parcourir le Dauphiné, le contempler, l’examiner, le détailler au point de rendre ce nouveau territoire visible, lisible et intelligible, c’est ce qu’entreprend Jean de Beins entre 1606 et 1609. De Chambéry à Sisteron, de Grenoble à Pignerol, il sera aux côtés de Lesdiguières pour mener à bien cette mission qui consistait à permettre au roi Henri IV d’avoir une idée visuelle de ce qu’était son royaume. En 1602, Lesdiguières encourage le roi de France à consulter des cartes pour mieux l’aider à se représenter la complexité de l’espace alpin : « La veue du lieu le feroit bien myeux comprendre que le discours, et vostre Majesté en sçaura bien plus […], si elle se faict monstrer la carte de ce Daulphiné. »
Les cartes apparaissent dès le début du XVIe siècle, mais de manière extrêmement sommaire et ne permettent pas de voir le territoire dans ses détails. Jean de Beins, en produisant près de cinquante cartes manuscrites, est le premier à donner, avec autant de précision, visibilité et intelligibilité aux Alpes.
Né en 1576 ou 1577, il devient géographe, ainsi que le mentionne l’attestation de Lesdiguières datée du 5 juillet 1611 : Jean de Beins « s’est adonné à l’étude et à l’art de fortifier toutes places, et faire toutes sortes de cartes tant générales que particulières pour bien loger et défendre une armée, en quoi il a comme atteint la perfection, et employé encore chaque jour tout son soin et industrie à nous servir en ses dites charges d’ingénieur de Dauphiné et Bresse et géographe des dits lieux ».
En 1604, Jean de Beins réalise ses premières cartes : il s’agit du Plan de la ville de Grenoble et de la Carte du hault Daulphiné.
En 1607, il est nommé « ingénieur du roi et géographe de Dauphiné et de Bresse ».
Fort de ses études, de ses connaissances de terrain, et accompagné d’un commis et des cartes manuscrites de ses prédécesseurs, Jean de Beins parcourt les vallées alpines pendant quatre années. La datation des cartes nous permet en effet de borner l’essentiel de sa production de 1606 à 1609.
Ses cartes servent de guide pour redécouvrir nos édifices religieux, châteaux et autres éléments du patrimoine alpin, et elles nous permettent de découvrir notre site de Montfort dans son environnement, la vallée du Grésivaudan.
La plupart des textes du présent article sont issues du livre publié à l’occasion de l’exposition programmée au musée de l’ancien Evêché de Grenoble du 21 octobre 2017 au 28 février 2018.
Note : cliquez sur les cartes pour les afficher en plus grand.
La Carte du hault Daulphiné embrasse un espace compris entre Chambéry et Sisteron, du nord au sud, et entre Grenoble et Pignerol, d’ouest en est. Cette carte est orientée avec le sud en haut. Montfort n’apparait pas sur cette première carte.
La carte la plus connue de Jean de Beins, est une copie « raccourcie et réduite » de la Carte Generalle de Dauphiné, orientée vers le nord, éditée pour la première fois en 1622. Montfort y est mentionné.
La Carte Generalle de Dauphiné imprimée entre 1617 et 1620 est un ensemble de onze cartes représentant l’ensemble de la province. Pour parvenir à ce résultat, Jean de Beins a combiné les relevés réalisés pour ses cartes particulières depuis 1604. Montfort y est représenté de façon très sommaire.
Le Baillage de Greyzivaudan & Trieves a été publié en 1619, après la Carte Generalle de Dauphine et propose une synthèse de tous les éléments que Jean de Beins a pu relever sur ses cartes particulières. L’insertion de nombreux détails en tout genre montre l’étendue des informations que Jean de Beins a pu accumuler au cours des années passées à la reconnaissance du Dauphiné : Montfort y est dessiné !
Cette carte couleur est peut-être la plus belle de l’exposition, et montre la seule représentation que nous connaissons de notre château de Montfort, quelle émotion de reconnaitre son donjon, le logis des gardes, et peut-être même la tour ronde et la aula, mais le rempart est manquant.