La cartographie médiévale
Conférence 2020
Tenue en septembre lors des Journées du Patrimoine grâce à l’obligeance de la Médiathèque de Crolles qui nous a permis, en respectant parfaitement les règles sanitaires, de maintenir ce moment passionnant.
Fabrice Delrieux, excellent pédagogue, nous a fait découvrir l’évolution de la représentation du monde dans les temps médiévaux.
L’obscurantisme chrétien réfutait les connaissances déjà bien établies depuis Ptolémée (100-168 env.) et mettait Jérusalem au centre des trois continents connus, la terre plate et ronde, entourée des océans comme le dit la Bible...
Le monde connu au Moyen Âge, tel que décrit par l’érudit du VIIe siècle Isidore de Séville est ainsi :
« Orbis a rotunditate circuli dictus, quia sicut rota est […] Undique enim Oceanus circumfluens eius in circulo ambit fines. Divisus est autem trifarie: e quibus una pars Asia, altera Europa, tertia Africa nuncupatur. »
« Le monde est dit « rond » d’après la rondeur d’un cercle, parce que le monde est tel une roue […] En effet, l’Océan qui l’entoure de toutes parts le délimite par un cercle. Il est divisé en trois parties, d’une part l’Asie, en second l’Europe et en troisième l’Afrique. »
Sur la carte TO, tournée vers l’Orient, les trois continents connus (terra cognita) l’Asie, l’Europe et l’Afrique sont placés de part et d’autre de barres verticale et horizontale, formant un T :
- Au-dessus de la barre horizontale l’Asie ;
- À gauche de la barre verticale (symbolisant la Méditerranée) l’Europe ;
- À droite l’Afrique ;
- La barre placée horizontalement représente le Tanaïs (le Don de nos jours) et le Nil, supposés être en ligne.
À la croisée des deux barres, on trouve Jérusalem (avec le tombeau du Christ), centre du monde.
Le T est entouré d’un O représentant l’océan, d’où le nom de carte TO.
Ne pas croire à cette représentation qui coule sous le sens, vous menait au bucher.
Le géographe musulman Muhammad al-Idrissi, dessina en 1154 la carte intitulée Tabula Rogeriana sur ordre du Normand Roger II, Roi de Sicile, île à la confluence des influences de l’Europe et de L’Afrique (le plus souvent connu sous le nom Tabula Rogeriana (lit. « Le Livre de Roger » en latin) elle est tirée du «livre des voyages agréables dans des pays lointains »).
Pendant près de vingt ans, le géographe arabe collecta des informations orales auprès des voyageurs et réalisa un véritable quadrillage du monde connu. Avec plus de 5.000 toponymes, dont la moitié environ proviennent de ses prédécesseurs, al-Idrissi réalise une véritable somme encyclopédique des connaissances géographiques de son époque et bouleverse l’image du monde connu en y plaçant l’Europe, même si le centre du monde représenté reste bien en Orient, quelque part entre La Mecque et Bagdad.
Reproduction basée sur une copie de la fin du Moyen-Âge (1300 ou 1486). Le texte en arabe a été retranscrit en latin par le cartographe allemand Konrad Miller vers 1888.
Puis vinrent les portolans ou carte marine, sorte de carte de navigation, utilisée du XIIIe au XVIIIe siècle, servant essentiellement à repérer les ports et connaître les dangers qui peuvent les entourer : courants, hauts-fonds... L’établissement de ces cartes nautiques est basé sur le cabotage : les bateaux se déplaçaient à proximité des côtes, par mesures visuelles, en fonction du cap.
A première vue, ces cartes apparaissent incompréhensibles car le portulan est réalisé comme une toile d’araignée (entrelacs de lignes vertes et rouges, les mateloires. Cela ne représente pas encore les méridiens et les parallèles qui n’apparaitront qu’avec la redécouverte des travaux de Ptolémée.
L’invention de la boussole ou plutôt son introduction en Europe vers le XIIIe siècle (puisque cette invention chinoise date d’environ 2.000 ans ) place désormais le nord en haut des cartes, les cartes théologiques du Moyen Âge plaçant généralement l’orient en haut de la carte (lieu probable du paradis terrestre).
La carte qui, mise sur un globe terrestre (dont les Grecs avait déterminé la taille depuis 1.500 ans), décida Christophe Colomb à partir plein ouest pour rejoindre les Indes, puisqu’il n’y avait que 2.000 km… petite erreur d’échelle !
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